Résumé:
Dans le domaine du génie civil, le recours aux modèles numériques (éléments finis en particulier) est de plus en plus fréquent, surtout lorsqu’il s’agit de prédire des champs de déplacements au voisinage de projets d’envergure : excavations profondes, tunnels en milieu urbain, fondations d’ouvrages de grande hauteur, etc. L’instrumentation de ces projets au moyen d’inclinomètres, de piézomètres, permet de confronter la réalité du chantier aux calculs, et à réagir en cas de divergence des mesures par rapport aux prédictions effectuées a priori. L‘idée d’appliquer l‘approche Bayésienne formalise la méthode observationnelle dans le cadre probabiliste. Cette méthode inverse permet de réduire les incertitudes des paramètres d’entrée de nos modèles, et ainsi préciser la probabilité de défaillance Pf, soit à l’ELU (facteurs de sécurité), soit à l’ELS (déplacements admissibles).
Commençons donc par définir ce cadre probabiliste. Les paramètres d’entrée des modèles de calcul dans le monde du génie civil sont entachés d’incertitudes. En géotechnique en particulier, les paramètres de résistance et de déformation des sols sont définis sur la base d’un petit nombre de sondages. Le niveau de la nappe phréatique et les charges sont également incertains.
Les approches classiques, documentées dans les normes en vigueur, préconisent l’utilisation de facteurs de sécurité globaux ou partiels permettant de définir des valeurs de calcul prudentes en vue de dimensionner les ouvrages situés à la frontière de l’interaction sol-structure. Dans le cadre de ces approches classiques, la quantification du risque est très difficile, puisque sa définition communément admise englobe les notions de danger, de gravité, d’acceptabilité, et dépend surtout directement de la probabilité d’occurrence d’une défaillance. Or, les approches probabilistes permettent de prendre en compte ces incertitudes et définir les paramètres d’entrée de nos modèles non pas de manière déterministe, mais plutôt à l’aide de distributions statistiques. Les résultats (efforts, déplacements, facteurs de sécurité) seront donc eux aussi probabilistes, les incertitudes étant propagées au travers de nos modèles de calcul, qu’ils soient analytiques ou numériques.
Dans ce cadre prorabiliste, on peut mener des analyses de sensibilité, et des analyses de fiabilité. Les analyses de sensibilité fournissent une meilleure compréhension des phénomènes puisqu’elles permettent de déterminer les variables d’entrée les plus influentes sur les résultats. Lors d’analyses à la ruine (état limite ultime ou ELU), les analyses de fiabilité déterminent la probabilité de défaillance Pf (pour probability of failure) d’un ouvrage comme étant l’intégrale sous la densité de probabilité du facteur de sécurité FS, lorsque FS < 1. Lacasse souligne le que l’écart-type de la distribution de probabilité de FS joue un rôle très important dans l’estimation de Pf : il est ainsi possible d’obtenir une grand probabilité de défaillance, même avec un facteur de sécurité moyen élevé.